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Le tantra selon Sudheer Roche

Le livre de référence du Tantra est le “Vigyana Bhairava Tantra”; il vient de l’Inde, il a 5000 ou 10.000 ans d’âge; il recense et condense sous forme d’aphorismes, les recherches et les expérimentations de nombreuses et très anciennes écoles de Tantra.
Tantra signifie : “méthode”, Vigyana Bhairava Tantra : “méthodes d’expansion de la conscience”. Dans leur simplicité et leur étonnante profondeur ces pratiques millénaires dépassent et élargissent les compréhensions de nos psychologies occidentales.

Freud, Jung et Reich ont préparé le terrain pour un renouveau du Tantra en Occident.
L’approche de la psychologie et celle du Tantra ont ce point en commun: elles sont pragmatiques. Il n’y a pas de vision morale, il y a simplement la rencontre de ce que nous sommes.

Les religions ont fait l’inverse: elles nous ont séparé de notre réalité en nous proposant un idéal de perfection impossible à atteindre ; elles ont implanté en nous la culpabilité.

Avec la psychanalyse et les diverses formes de psychothérapies inspirées d’elle, l’homme retrouve son humanité; il valorise ce qu’il est; il se réapproprie ses désirs et sa sexualité.

Vous dites que le Tantra est avant tout un état d’esprit ?

Oui, le Tantra, ce n’est pas adhérer à des croyances ou à des dogmes; ce n’est pas répéter des rituels extérieurs à soi .

Ce n’est pas non plus appliquer des techniques pour atteindre des états extraordinaires. Le but n’est pas de contrôler l’énergie mais de s’y abandonner, entrer dans un état de “non-faire”, sans effort, se laisser guider par l’énergie. Le grand maître tantrique bouddhiste, Tilopa, ne donne aucune technique; voici ce qu’il enseigne: “soyez détendus et naturels”, “soyez comme un bambou creux”, quand le bambou est vide le divin peut jouer sa musique.

Le Tantra n’impose rien, il n’est pas normatif ; il ne dit pas vous devez faire ceci et pas cela ; il n’ évalue pas en terme de bien ou de mal. Les clefs sont: non jugement, conscience et relaxation.
Soyez ce que vous êtes sans rien rejeter. Tout peut être une occasion de transformation. Il suffit de se détendre, regarder et vivre ce qui se présente dans la lumière de la conscience.
Ne pas chercher à changer mais à connaître. La conscience transforme, pas la volonté ; car la volonté reste soumise aux conditionnements reçus. Le moi qui se veut à l’origine du changement est l’endroit le plus conditionné.
Dans une atmosphère de conscience, les empreintes négatives des conditionnements contraires à la vie s’effacent. Nous retrouvons la spontanéité perdue ; celle d’avant la chute, une spontanéité originelle , la source même de la création.

L’ Énergie sexuelle est donc la base de l’ énergie spirituelle ?

Ce qui est en haut est aussi en bas et réciproquement. Lorsque la conscience s’incarne, l’énergie vitale se sublime.

Qui pratique ?

Ceux qui veulent vivre leur sexualité autrement. Ceux qui pressentent qu’il y a dans la sexualité autre chose que le plaisir, ceux qui ont soif d’ une autre dimension.

Les approches de l’homme et de la femme sont-elles différentes ?

Oui différentes et complémentaires : Chacun possède une partie du puzzle. L’homme est focalisé sur le sexe, il pénètre il agit. La femme est présente dans les seins, elle aime, elle reçoit, elle inclut. Il existe une méditation réservée aux femmes où elle entre dans ses seins et elle devient ses seins …

L’homme initie la femme à la sexualité, la femme initie l’homme à l’amour.
Quand il fait l’amour, l’homme éveille l’ énergie sexuelle de la femme. La femme laisse entrer l’ énergie sexuelle de l’ homme qui monte jusqu’à son coeur. L’homme laisse rentrer l’amour de la femme dans son coeur, d’où l’ énergie redescend dans son sexe. Dans ce cercle d’énergie, une alchimie s’opère entre le sexe et le coeur. Le coeur gagne le feu du bas, le sexe gagne la douceur du coeur. Les deux énergies fusionnent, elles ne fonctionnent plus de façon séparée .

Peut-on pratiquer le tantra entre personnes de même sexe ?

Oui mais la polarité des énergies ne pourra pas jouer à fond, car elle est liée a la biologie. Certains hommes sont plus féminins, certaines femmes plus masculines, mais la polarité reste incomplète ; le cercle d’ énergie ne peut pas les mener au
bout du chemin.

Le bout du chemin ?

Trouver l’unité de l’homme et de la femme à l’intérieur de soi-même. Les noces alchimiques, un état où notre partie masculine et féminine font l’amour ensemble, où nos énergies s’unifient, un état de félicité permanente, “Mahamudra” le grand orgasme .

Il s’agit de l’orgasme des mystiques ?

Oui dans cette “union mystique” il n’y a plus de manque de l’autre. Libre de cette dépendance on commence vraiment à aimer; car l’amour est alors devenu un état d’ être.

Comment dépasser le manque de l’autre ?

Première Clef : Être centré en soi même.
“Dans la joie de retrouver un ami, pénétrez votre joie” fondez vous en vous même au lieu de chercher à vous fondre dans l’autre. Ce que vous cherchez se trouve à l’ intérieur de vous. Le miracle est en vous. L’autre est l’occasion de trouver en vous l’universel ; c’est à dire l’endroit où “je” et “tu” ne sont pas séparés.


Le paradoxe est celui ci : plus je célèbre en mon temple intérieur l’ avènement de cette joie plus cette joie va d’elle même rayonner vers l’autre. Nos temples ne sont pas vraiment indépendants , ils sont reliés ; ils font partie d’un ensemble plus vaste.

Deuxième Clef : nous cherchons la satisfaction dans l’autre, dans un objet extérieur. Cet objet nous fascine et nous y perdons notre conscience.
Quand, dans la recherche du plaisir, on amène de la conscience, on réalise que l’objet désiré ne tient pas réellement sa promesse. Il satisfait partiellement et momentanément tout en laissant un vide impossible à combler.


Généralement, nous évitons de rencontrer cette frustration; d’où une surenchère d’objets, une frénésie, une boulimie de consommation ; l’obsession de l’objet occupe tout l’espace intérieur. On en veux toujours plus pour ne pas rencontrer le manque.

La frustration rencontrée en pleine conscience nous fait voir ceci : ultimement, la satisfaction ne peut être trouvée du coté de l’objet. Le manque n’est pas au fond un manque d’objet, c’est une soif plus profonde, une aspiration de l’âme qui porte en elle la nostalgie du paradis perdu.

Le Tantra nous indique une voie pour retrouver ce paradis au sein même de l’existence terrestre. Cette pratique prends pour modèle la première action de notre vie, elle s’ applique aussi à toutes les autres:

“Sucer et devenez le mouvement de sucer”. Ne restez pas hypnotisé par le sein. Oubliez vous, laissez le “je” se dissoudre dans l’action vivante.
Dans ce mouvement, le sujet et l’objet du désir s’effacent.
On entre dans la fontaine de Jouvence, on retrouve l’éternelle jeunesse ,
On a la co-naissance de la source de toutes choses…

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